lundi 5 mai 2008

La face cachée du soleil

Depuis deux jours, il fait beau et chaud. Comme ça, sans prévenir, le ciel a viré du gris à bouclettes au bleu rayonnant. Au fait, vous savez pourquoi il est bleu, le ciel ? C'est azurément simple. L'atmosphère est remplie de petits atomes qui mangent tous les rayons lumineux, avec plus ou moins d'appétit. D'ailleurs les rayons bleus c'est dégueu, en tout cas ils aiment pas du tout ça. Alors ils nous les recrachent. Et voilà le travail ! Pire, on vous a dit comment ça se fait qu'on a plus chaud à cette époque ? C'est en fait la faute de la planète qui présente nos têtes au soleil dans une rituelle inclinaison, de manière à ce qu'il puisse jouer aux fléchettes sur nous sans nous rater. En hiver, tout ce qu'il peut faire à la rigueur, c'est nous frôler de ses rayons, nous caresser la tête. Alors on le sent à peine. Six mois plus tard, grâce à cette révérence terrienne très protocolaire, il nous les plante tout drait dans le haut du crâne, ses rayons. Eh bien, vous me croirez si vous voulez, mais quand le vomi d'atomes est à son comble, et lorsque le soleil commence à embrocher les humains, ces derniers exultent et se tortillent au bout de ses piques. C'est comme ça qu'on reconnaît l'été ici.

Une belle journée de mai à Paris et c'est bien simple, le jardin du Luxembourg se transforme en rame de métro : un monde fou et pas la moindre place assise. J'imagine aujourd'hui Seurat voulant y peindre une oeuvre du genre de la grande Jatte. Il n'aurait pas son pareil pour rendre la luminosité des lieux avec sa technique divisionniste (ou pointilliste, pour ceux qui préfèrent ce terme teinté d'ironie). Ensuite, il ne lui resterait plus qu'à mettre des yeux et une bouche à chaque petit point de son tableau pour figurer la densité humanoïde. On appellerait peut-être ça le multipliyisme.


Depuis deux jours, les chaises des terrasses ont des allures de champs de tournesols, le bitume et nos pieds vite ampoulés libèrent leurs âcres parfums ; sous les toits en zinc et derrière les baies vitrées, la grillade humaine court siroter un breuvage industriel ruineux dans le bruit des moteurs. Oui, le beau temps en ville, ça a quelque chose d' incohérent. On savait déjà que la vie citadine n'est pas tout à fait normale, la clémence des éléments vient nous le rabâcher. Alors on fait ce qu'on peut avec cet encombrant don du ciel.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Dans le Sud ouest, c'est depuis une semaine que l'on sent le soleil sur nos peaux. J'adoooooooore !

Anonyme a dit…

Un bien bel article en vérité.

Stéphane